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Introduction

Quel est le type de technologie de surveillance qui vous a aidé à vous sentir mieux? A-t-il eu cet effet sur le long terme? S’agissait-il du logiciel qui vous forçait à prendre une pause ou du podomètre qui attirait votre attention sur le fait que vous ne bougiez pas assez? Ou était-ce l’outil de discussion professionnel grâce auquel vous pouviez garder le contact avec vos collègues? Ces technologies ne sont-elles que des gadgets ou davantage? Si elles sont davantage que des gadgets, peuvent-elles nous aider dans notre recherche du bien-être?

Le présent article vise à répondre à toutes ces questions. Nous commençons par expliquer ce que l’on entend par technologies de surveillance, bien-être et technologies de surveillance en faveur du bien-être. Ensuite, nous abordons l’invasion du lieu de travail par la surveillance électronique traditionnelle des performances professionnelles (SEP) et les technologies de l’information et de la communication (TIC) et la comparons avec les technologies de surveillance en faveur du bien-être. À partir de cette analyse, il est possible de définir cinq grands défis qui devront disparaître ou être surmontés pour que les technologies de surveillance atteignent leur maturité. Enfin, nous clôturons cet article par une brève conclusion.

Les technologies de surveillance

Le smartphone dans notre poche, la montre de sport à notre poignet et le nuage dans lequel nous stockons nos données indiquent que nous sommes entrés dans l’ère de la surveillance. Bien plus que nous croyons nous en rendre compte; nombreux sont ceux qui prétendent que les technologies de surveillance sont bénéfiques pour notre santé et notre bien-être. Mais en quoi les technologies de surveillance consistent-elles réellement?

Au sens strict, les technologies de surveillance servent à observer, surveiller, ou superviser et vérifier systématiquement la progression ou la qualité de quelque chose ou de quelqu’un pour une période déterminée, grâce à un capteur ou à un ensemble de capteurs (par exemple, des capteurs de sons, d’images, de position et de signaux biologiques). En ce qui concerne les personnes, les technologies de surveillance, parfois appelées surveillance du comportement ou du mode de vie, forment un sous-ensemble d’un modèle plus vaste et plus général de technologies opérant à distance, comme la télé-assistance et la sécurité.

Des capteurs sont installés sur les personnes ou dans leur corps et leur environnement et fournissent des informations dont il est possible de déduire leur état physiologique et leur comportement. Souvent, les états physiologiques et les comportements normaux se distinguent par des paramètres différents de ceux qui sont inhabituels. Parmi ces derniers, nous devrions au moins faire une différence entre les anomalies soudaines (une crise cardiaque ou une chute) et les changements progressifs (comme une lente augmentation des niveaux de stress).

Les technologies de surveillance peuvent revêtir plusieurs formes que l’on peut caractériser grosso modo selon les modalités employées:

  • le son (par exemple, la reconnaissance vocale automatique);
  • les signaux biologiques (par exemple, un électrocardiogramme);
  • l’image (par exemple, les expressions faciales);
  • le texte (par exemple, des messages Twitter);
  • les échantillons sanguins (par exemple, les taux d’hormones);
  • les interactions [par exemple, l’interaction entre le clavier et la souris, les capteurs de pression, le système mondial de positionnement (GPS);
  • les questionnaires (qui utilisent, par exemple, l’échelle de Likert à cinq points); et
  • les entretiens (par exemple, avec un robot de discussion).

Étonnamment, ces modalités sont rarement combinées. Toutefois, la collecte ou l’enregistrement de ces (méga)données ne représentent qu’une partie de l’équation. Il est très probable qu’il s’agisse en réalité de la partie la plus simple. Il faut ensuite procéder au stockage, au partage et à l’analyse de ces données. L’analyse en elle-même, notamment, constitue déjà un processus de traitement complexe. En outre, il est souvent nécessaire, ou du moins préféré d’analyser les données pour discerner les structures récurrentes et les facteurs soutenant la prise de décision.

Le bien-être

Concrètement, qu’est-ce que le bien-être subjectif ou psychologique, également appelé «bonheur»? Le bien-être englobe un large éventail d’aspects, tels que la satisfaction de la vie, l’équilibre hédoniste et l’épanouissement. L’évaluation affective et cognitive de sa propre existence est au centre du concept de bien-être. Elle couvre tant le spécifique et le concret que le global et l’abstrait: des expériences momentanées par rapport aux jugements globaux des personnes envers leur vie entière. Pour toutes ces raisons, le bien-être subjectif est un concept extrêmement difficile à circonscrire. Pouvons-nous détecter nous-mêmes les signaux critiques? Si oui, savons-nous comment traiter ces signaux utilement? Est-il possible de franchir ce fossé sémantique, qui sépare les signaux de faible importance des modèles psychologiques avancés? Peut-être l’exercice est-il plus facile pour certains que pour d’autres; quoi qu’il en soit, les preuves à disposition sont, au mieux, fragiles.

Il y a dix ans, Cary L. Cooper (2007) a attiré notre attention sur l’une des principales menaces pour notre bien-être: le stress. Voici ce qu’il déclarait: «Il s’agit là, je pense, du fléau du XXIe siècle. Pour moi, le stress est la principale source ou le principal déclencheur de maladies dans le monde développé du XXIe siècle» (ABC Catalyst). En 2016, Bartol[1] a exprimé son inquiétude par les propos suivants: Nous sommes tous confrontés à des défis et au stress résultant de nos relations, des problèmes financiers, du travail ou des traumatismes du passé. Bien que nous puissions ne pas nous percevoir comme malades, le stress peut affaiblir notre système immunitaire, nous conduire à trop manger et provoquer de l’hypertension, des troubles cardiaques ainsi que d’autres maladies. Des activités récréatives axées sur la santé auraient des retombées sur les causes du stress, mais aussi sur les réactions au stress, sur l’estime de soi, le mode de vie et les relations plutôt que de simplement s’attaquer aux symptômes de la maladie après que celle-ci se soit déclarée.»

Les technologies de surveillance peuvent-elles diminuer notre stress? Peuvent-elles améliorer notre bien-être? Où trouver des statistiques étayant ces affirmations? Avons-nous un quelconque besoin de telles statistiques? Même en l’absence de statistiques, le potentiel des technologies de surveillance est largement incontesté. Dès lors, quels sont exactement les paramètres surveillés? Selon les acteurs de l’industrie et de la science, les dispositifs portables peuvent surveiller notre mode de vie, notre niveau de stress et même la qualité de notre sommeil, pour ne nommer que quelques paramètres. Le plus surprenant est qu’ils prétendent détecter tous ces paramètres à l’aide d’ensembles de capteurs similaires. La magie réside donc probablement dans les algorithmes utilisés pour traiter les signaux détectés par les capteurs et en tirer des informations qui font du sens.

Les technologies de surveillance en faveur du bien-être

S’il est déjà difficile de percevoir le bien-être des autres, mais aussi d’atteindre et d’entretenir une sensation personnelle de bien-être intense, comment les technologies de surveillance peuvent-elles le faire à notre place? Ces technologies doivent être programmées pour réaliser ce que nous ne pouvons faire nous-mêmes. Quoi qu’il en soit, essayer de surveiller notre bien-être en vaut-il la peine? Sans aucun doute! Par ailleurs, il ne faut pas sous-estimer le potentiel de la surveillance. Elle peut nous aider, que ce soit consciemment ou inconsciemment, de nombreuses façons, notamment en contrôlant:

  • le bien-être physique à long terme (par exemple, les troubles cardiovasculaires et notre système immunitaire);
  • réactions physiologiques (par exemple, lors de la communication);
  • les processus cognitifs (par exemple, les perceptions, la mémoire et le raisonnement) et
  • le comportement (par exemple, les expressions faciales, le discours, les mouvements et le toucher).

Elle peut par conséquent contrôler notre bien-être. Ainsi, elle peut contribuer de manière significative à:

  • réaliser des examens médicaux en continu de manière (semi-)automatique et favoriser le bien-être (ces technologies devraient devenir partie intégrante des soins de santé au sens actuel);
  • améliorer le bien-être des personnes en bonne santé (cela permettrait de diminuer les coûts des soins de santé de manière significative) et
  • prévenir les maladies liées au stress qui deviennent rapidement la catégorie de maladies la plus courante.

Autrement dit, elles peuvent nous aider à nous comprendre et à prendre soin de nous-mêmes.

Tout ceci illustre la complexité de la surveillance du bien-être qui s’explique essentiellement par:

  • son besoin d’une approche globale, alors que les pratiques et connaissances actuelles de la science et de l’ingénierie sont dispersées;
  • la fragilité des cadres théoriques de la médecine (y compris par exemple la physiologie et les neurosciences) ainsi que de la psychologie sur lesquels elle doit reposer - certaines étapes ont déjà été franchies, mais il en reste bien d’autres; et
  • maîtriser les incroyables variations continues dans un nombre inconnu de dimensions qui caractérisent notre monde.

Heureusement, le stress lié au travail (y compris à la charge de travail) a déjà fait l’objet de nombreuses études au cours du XXe siècle. Ces travaux fournissent une base solide pour comprendre et déterminer les mécanismes qui sous-tendent le stress. Ils proposent également un cadre théorique relativement solide qui a déjà permis d'atteindre des résultats prometteurs. Dans un contexte spécifique, avec un objectif particulier comme la «surveillance du stress lié au travail», les technologies de surveillance peuvent déjà remplir leurs promesses dans un laps de temps beaucoup plus court.

Parmi tous les canaux qui peuvent être surveillés, les signaux biologiques semblent être les plus prometteurs pour relever les défis à venir. Cela n’a rien d’étonnant à en croire la notion de William James selon laquelle les humains sont des «mécanismes psycho-neuro-physiques»[2]; les humains envoient et perçoivent des signaux biologiques qui peuvent être enregistrés. Ces signaux biologiques peuvent être révélateurs d’un ensemble de caractéristiques propres à une personne, y compris de son bien-être. Ces signaux peuvent toutefois être altérés par du bruit, et les biocapteurs doivent souvent être placés directement contre la peau de l’utilisateur pour garantir un bon rapport signal/bruit. Néanmoins, les signaux peuvent être mesurés à l’aide de capteurs non invasifs et relativement discrets (par exemple, les montres de sport qui mesurent le rythme cardiaque), ce qui les rend adaptés à un usage quotidien. En outre, ils comportent l’avantage supplémentaire d’être insensibles aux comportements sociaux de dissimulation. En effet, s’il est possible de masquer son chagrin par un sourire, la tension musculaire ou le rythme cardiaque échappent en revanche à tout contrôle.

En fin de compte, les biocapteurs sont sensibles au bruit, mais, à cet égard, ils ne sont pas différents des autres canaux (par exemple, audio, visuel ou même textuel). Tous les canaux présentent le biais de différences, à la fois entre les personnes (par exemple, en termes de personnalité) et entre les comportements d’une personne (par exemple, d’un jour à l’autre). Que ce soit la fête de la veille, les conversations de la journée au travail ou le sommeil interrompu la nuit précédente par les pleurs du bébé, tous ces événements influencent notre bien-être, quelle que soit la manière dont il est mesuré.

Les signaux biologiques peuvent être aisément obtenus grâce aux technologies portables émergentes et discrètes, notamment:

  • les méthodes de détection discrètes;
  • les technologies textiles intelligentes et
  • l’électronique flexible, extensible et imprimable.

Ces éléments offrent un large éventail de capteurs et permettent le traitement avancé de signaux biologiques.

Les amplificateurs, les filtres et les puces intégrées spécifiques permettant le (pré)traitement des signaux peuvent constituer une partie intégrante des technologies de surveillance, ce qui les rend extrêmement efficaces. Cependant, tout cela a évidemment un prix. Mais dans le cas présent, cela n’est pas un problème, étant donné qu’aujourd’hui même les smartphones les moins sophistiqués possèdent une capacité de calcul suffisante pour (pré)traiter les signaux captés en temps réel. Si une puissance de calcul supérieure est nécessaire, le «nuage» peut la fournir. Nous sommes confrontés à des limitations, tant que ce qui concerne le débit des liaisons wifi que la durée de vie des batteries des smartphones, mais ces défis sont les plus aisés à surmonter. Le principal défi réside dans l’interprétation des données. Que nous disent-elles? Sommes-nous stressés? Souffrons-nous de troubles cardiovasculaires? Sommes-nous en train de contracter la grippe? Avons-nous faim? Sommes-nous agités? Notre environnement nous place-t-il dans l'inconfort? Tout ces éléments peuvent provoquer, et provoqueront, des changements dans les signaux que nous transmettons et, par conséquent, dans les signaux qui seront surveillés.

Il existe déjà toute une gamme d’applications jouant le rôle d’interfaces avec les technologies de surveillance; comme celles qui réalisent des contrôles médicaux limités de prochaine génération. À titre d’exemple, on peut citer notamment les coaches en ligne qui vous assistent pendant votre sommeil, l’exercice physique et la consommation d'aliments propres à diminuer leur diabète. Toutefois, nombre de ces applications n’utilisent pas de biocapteurs ou n’utilisent que des biocapteurs rudimentaires, et manquent souvent d’une validation clinique solide. Il y a donc tout à gagner pour les technologies de surveillance discrètes lorsqu’il est prouvé qu’elles permettent de capter un signal fiable et, par la suite, d’établir une analyse fiable.

Surveillance électronique précoce des performances au travail

Il y a plusieurs dizaines d’années, l’industrie avait déjà adopté des technologies de surveillance dans le but de suivre à la fois les travailleurs et les machines, à l’époque où l’homme était presque considéré comme une catégorie de machine spécifique. Ce type de surveillance est souvent appelé surveillance électronique des prestations (SEP). Ces technologies sont utilisées pour surveiller les prestations, et non le bien-être. Les avantages dont il a été fait état pour ce type de surveillance sont nombreux, notamment en ce qui concerne la manière dont il:

  • contribue à déterminer les besoins en matière de formation;
  • facilite la fixation d’objectifs;
  • peut entraîner des gains de productivité;
  • facilite le télétravail et les horaires flexibles;
  • contribue à la planification des ressources;
  • augmente la valeur des investissements dans les systèmes informatiques;
  • peut fournir des observations immédiates et objectives et
  • réduit la partialité lors des évaluations de performances.

Toutefois, en parallèle, divers désavantages de ce type de surveillance ont été signalés, notamment concernant la manière dont il:

  • peut porter atteinte à la vie privée;
  • augmente le stress et peut avoir des effets négatifs sur la santé à long terme;
  • peut diminuer la satisfaction et la motivation;
  • est susceptible de réduire les contacts entre les salariés et leurs supérieurs;
  • est susceptible de réduire les contacts entre les salariés et leurs collègues;
  • peut mener à se concentrer sur la quantité de travail au détriment de la qualité;
  • peut transformer l’ambiance de travail en un climat d’«atelier de misère électronique» et
  • peut submerger le superviseur de données et d’attentes d’observations en retour.

La plupart des avantages et des inconvénients s’appliquent également aux technologies de surveillance en faveur du bien-être.

En tant que technologie de surveillance, la mise en oeuvre de la SEP est potentiellement bénéfique à la fois pour l’employeur et l’employé. Cependant, si la SEP était à l’origine utilisée pour maximiser la production, son objectif devrait aujourd’hui être étendu au bien-être général de toutes les parties prenantes. Sur le long terme, cela devrait également mener à une maximisation de la production.

L’invasion des TIC dans le cadre professionnel

Les technologies de surveillance constituent une catégorie spécifique de technologies de l’information et de la communication (TIC) qui présente des avantages et des inconvénients. Malgré leurs limites, rares sont ceux qui mettent en question leur potentiel. Toutefois, les technologies de surveillance, comme toutes les TIC, comportent des aspects négatifs. Cette section aborde certains des risques liés à l’utilisation des TIC, tels que les technologies de surveillance, au travail.

Bien avant l’ère des smartphones et des tablettes, les TIC étaient déjà responsables de problèmes de santé au travail. Au fil des décennies qui se sont écoulées depuis, l’utilisation des TIC au travail a été renforcée par l’usage des ordinateurs portables, des tablettes, des smartphones et même des dispositifs portables (comme les montres intelligentes). Au début, les problèmes de santé recensés étaient principalement d’ordre physique et incluaient:

  • des troubles musculosquelettiques, y compris des microtraumatismes répétés;
  • des troubles visuels;
  • des maux de tête;
  • des cas d’obésité (par exemple en raison d’un manque d’activité physique);
  • des troubles liés au stress (par exemple, du surmenage).

Plus récemment, il a été recensé autant de problèmes liés aux TIC en ce qui concerne le bien-être subjectif qu’en ce qui concerne le bien-être physique. Par conséquent, cinq problèmes de santé supplémentaires liés aux TIC ont été ajoutés à la liste originale:

  • des troubles du métabolisme, comme des carences en vitamines et le diabète;
  • des addictions (par exemple aux jeux, aux médias sociaux et à l’internet);
  • des troubles du sommeil;
  • de l’isolement social et
  • une conception irréaliste du monde (à l’origine de dépressions, par exemple).

Établie il y a 25 ans, la liste ne comportait à l’origine que six rubriques, parmi lesquelles les troubles liés au stress étaient les seuls problèmes directement liés au bien-être subjectif. Aujourd’hui, la liste reprend autant de problèmes de santé liés au bien-être physique qu’au bien-être subjectif.

Les avancées rapides dans le domaine des TIC ont favorisé leur passage du lieu de travail au domicile. Par conséquent, la liste ainsi élargie mentionne des problèmes de santé d’ordre général, et non uniquement des problèmes de santé uniquement liés au travail. Toutefois, la séparation stricte et traditionnelle entre vie privée et vie professionnelle s’estompe en raison de leur interpénétration, en tout cas en ce qui concerne les travailleurs intellectuels. L’omniprésence de l’internet et les avancées de nombreuses autres TIC ont fait du travail flexible la nouvelle norme et offrent parallèlement aux travailleurs une liberté tout en exerçant une pression professionnelle constante.

Tout ceci nous amène à poser les questions suivantes: les technologies de surveillance viendront-elles allonger la liste des problèmes mentionnés ci-dessus? Se distingueront-elles des autres TIC et résoudront-elles plutôt les problèmes causés par les TIC? Dans cette dernière éventualité, les TIC de surveillance permettraient de prévenir ou de résoudre les problèmes causés par les TIC générales. Cela est possible, à condition que les technologies de surveillance soient véritablement axées à la fois sur l’humain et sur le travail.

Les défis de la surveillance du bien-être au travail

Les technologies de surveillance en faveur du bien-être deviendront-elles les nouvelles meilleures amies des travailleurs? Pour relever ce défi, les technologies de surveillance se fondent sur la façon de mener des expériences dans la recherche clinique, sur les interventions et les approches évolutives. En effet, il a souvent été avancé que tous les troubles professionnels liés aux TIC se résolvent à l’aide des technologies de surveillance. À titre d’exemple, les troubles musculosquelettiques peuvent être évités grâce aux technologies de persuasion. Le problème du manque d’activité physique est envisagé de manière similaire, tout comme les maux de tête, le diabète, les troubles du sommeil et l’isolement social. Il s’agirait donc d’une solution universelle. Toutefois, de nombreuses solutions se révèlent fragiles et les essais de contrôle aléatoires sont absents ou menés à petite échelle. En outre, les solutions relèvent des gadgets plutôt que de solutions cliniques ciblées. Le problème réside dans la tendance croissante à voir uniquement ce que l’ordinateur nous montre. Peut-être cela explique-t-il pourquoi la surveillance du bien-être au travail peine à s’imposer comme une pratique courante. Les applications qui vous forcent à prendre une pause sont conçues pour favoriser le bien-être des travailleurs, mais elles n’effectuent aucun suivi.

Interprétation

La rapidité et la facilité des calculs, des statistiques et même de l’apprentissage automatique ont poussé les chercheurs à torturer les données jusqu’à qu’elles délivrent leur message, simplement en calculant toutes les comparaisons possibles par analyse. Les hypothèses et même les cadres théoriques sont adaptés et, en outre, les multiples essais mènent à des conclusions erronées. Par conséquent, plus que jamais, les conclusions scientifiques doivent être traitées avec la plus grande précaution. Jamais le besoin de réplication n’a été aussi grand, étant donné que «nous ne pouvons pas parcourir le champ de la nature comme des vaches en pâture»[3]. Malheureusement, dans la quête de nouvelles opportunités scientifiques et commerciales, de nombreuses technologies de surveillance semblent également découler de cette pratique.

Les technologies de surveillance exigent de rendre les processus explicites, car, dans le cas contraire, elles ne pourraient être programmées et exécutées comme un progiciel ou une application connectés à certains capteurs. Quand on vise à mettre en oeuvre des cadres théoriques relatifs au bien-être, on se retrouve confronté à une absence de modèles spécifiques appropriés et la programmation se complique. De ce fait, les technologies de surveillance peuvent également représenter une méthode de validation des théories du bien-être, entre autres. En outre, lorsque les cadres théoriques sont correctement définis, la surveillance permet de les tester dans le monde réel, loin des environnements contrôlés des laboratoires. Nous sommes ensuite confrontés à l’incroyable variabilité de la vie. Bien souvent, en sciences humaines, cette variabilité fait l’objet d’une moyenne grâce à des statistiques avancées. Toutefois, que faire pour que cela fonctionne pour tout le monde? Dans ce cas, même les différences les plus subtiles peuvent se révéler importantes. Lorsqu’elles sont utilisées de manière appropriée, les TIC peuvent offrir des solutions grâce à l’apprentissage automatique et aux domaines de reconnaissance de tendances.

Sécurité

En principe, nous pouvons supposer que les données obtenues grâce aux technologies de surveillance peuvent être stockées indéfiniment, si nécessaire. Le nuage est-il adapté à cet usage ou est-ce que les données devraient être stockées localement, dans une maison, sur un dispositif portable ou sur le corps d’une personne? D’une façon ou d’une autre, la transmission sans fil semble presque inévitable. Malheureusement, par définition, celle-ci présente un risque pour la sécurité.

Des algorithmes qui endommagent les données au fil du temps ont été développés en partant du principe que les données plus anciennes, qui n’ont plus été utilisées depuis longtemps et ne sont que peu liées aux processus et aux données actuelles, ne sont plus importantes. Cependant, comment ces algorithmes sont-ils capables de faire les bons choix, alors que (une fois encore), cela semble difficile même pour les êtres humains? Ne devrait-on pas prendre l’histoire comme référence, et essayer de la comprendre, quand on sait que les événements et les processus ont tendance à se reproduire au fil du temps et des générations?

Il est possible de réduire les risques pour la sécurité de manière significative grâce à un ensemble de mesures de sécurité. Par exemple, de nouveaux types de biométrie pourraient être utilisés à cette fin; ils peuvent notamment poursuivre un double objectif lorsque les signaux biologiques ont déjà été enregistrés. Toutefois, en ce qui concerne la sécurité, il reste encore beaucoup à accomplir.

Le facteur de stress Big Brother

Les technologies de surveillance ont besoin entre autres d’un stockage, d’un traitement et d’une analyse des données, etc. Il est très probable, lorsque les données concernent notre bien-être, qu’elles soient très personnelles et ne doivent pas être partagées. Ce problème se pose particulièrement lorsque plusieurs technologies de surveillance sont combinées (par exemple le GPS, les signaux biologiques et audio), car elles peuvent révéler beaucoup plus d’informations ensemble que séparément.

Les gestionnaires peuvent employer plusieurs types de technologies de surveillance: «Parmi les plus courantes, on peut citer la surveillance par ordinateur, laquelle peut mesurer la précision et la vitesse de frappe sur le clavier des employés; la vidéosurveillance qui peut détecter le vol et la dissipation de la part des employés ainsi que veiller à la sécurité: l’espionnage, soit l’utilisation de techniques d’enquête en cas d’activité suspecte sur le lieu de travail; l’écoute clandestine et les écoutes téléphoniques qui permettent de suivre les appels entrants et sortants ainsi que la fréquence des appels des employés et le système de badges actifs qui permet de suivre les déplacements des employés sur le lieu de travail»[4]. Parallèlement, ces surveillances peuvent être étendues en détectant tous les signaux à l’aide de dispositifs TIC, comme les smartphones, les tablettes et les ordinateurs portables. Cela ne s’applique pas uniquement aux frappes sur le clavier. En effet, des textes entiers peuvent également être enregistrés. L’audiosurveillance est une extension naturelle, tout comme la géolocalisation (par exemple à l’aide d’un GPS) et les signaux biologiques.

Comme pour la surveillance électronique des performances, le travailleur peut estimer que les technologies de surveillance en faveur du bien-être portent atteinte à sa vie privée, ce qui est généralement perçu comme un facteur de stress. Cette perception est justifiée, c’est pourquoi, lors de la mise en oeuvre des technologies de surveillance en faveur du bien-être, les travailleurs doivent être en mesure de contrôler pleinement leurs données personnelles. Ils doivent donc pouvoir choisir les données à partager. Ce sentiment de contrôle peut réduire voire effacer le sentiment d’atteinte à la vie privée. Mais combien de personnes sont véritablement conscientes de l’utilisation qui est faite de leurs données, de ce qu’elles disent à leur propos, et de leur éventuel partage ultérieur?

L’employeur peut essayer de persuader le travailleur de fournir davantage d’informations. Les informations doivent toutefois être remises en contexte (par exemple, selon les circonstances personnelles du travail) avant de pouvoir interpréter correctement les données. Cela exigera très probablement au moins une intervention humaine, étant donné que le contexte est quelque chose de difficile à appréhender et à interpréter. Dans tous les cas, l’employeur doit être formé à l’interprétation et à l’utilisation des données fournies par les technologies de surveillance, car il sera tenu responsable des mesures prises sur la base des informations collectées.

Les technologies de surveillance intégrées et portables

Tout comme le bien-être subjectif, le bien-être physique peut également être surveillé. Toutefois, les distinguer peut parfois se révéler compliqué. Par exemple, l’utilisation d’un biocapteur de l’activité électrodermale permet de surveiller la production de sueur. Néanmoins, une personne transpire-t-elle parce qu’elle a de la fièvre, parce qu’elle est stressée ou simplement parce qu’elle a monté des escaliers? Dans les environnements contrôlés en laboratoire, cette réponse peut être déterminée, mais non dans le monde réel, incontrôlé, dont les variations infinies rendent cette opération très difficile, voire impossible. Toutefois, les technologies de surveillance peuvent offrir une certaine sécurité. Les technologies de surveillance peuvent, et sont déjà, utilisées pour réduire les coûts.

  • Dans les boucheries, des accidents continuent de se produire malgré l’utilisation de couteaux professionnels. Les travailleurs oublient tout simplement qu’ils tiennent un couteau en main lorsqu’ils se rendent aux toilettes ou lorsqu’ils engagent une conversation. Un simple système de suivi localisé pourrait être utilisé pour tracer la position des couteaux et pourrait émettre un signal lorsque quelqu’un emporte un couteau hors des zones autorisées.
  • Les travailleurs intellectuels pourraient bénéficier d’une souris antistress capable de détecter leur stress. Cette souris peut fonctionner à l’aide de capteurs de pression et de biocapteurs pour déterminer le niveau de stress. Par triangulation des signaux, il est possible d’obtenir un indicateur de stress assez fiable. Des observations peuvent être apportées au travailleur, à l’employeur, aux collègues ou à tous à la fois.
  • En ce qui concerne les soins aux personnes âgées, plusieurs capteurs sont utilisés pour évaluer la sécurité des patients. Ces capteurs sont munis de caméras et de microphones et servent d’yeux et d’oreilles à distance pour les soignants. De cette manière, un soignant peut surveiller plusieurs personnes âgées simultanément. La politique générale veut que chaque personne âgée soit à même de contrôler quand la technologie de surveillance est activée ou quand elle ne l’est pas. Cela nécessite toutefois que la personne soit capable de prendre une telle décision.
  • Le défibrillateur cardiaque implantable (DCI) est un exemple parmi d’autres de technologie de surveillance invasive utilisée dans la pratique quotidienne pour soigner les personnes. Un DCI est un petit dispositif placé dans la poitrine ou dans l’abdomen qui est capable de corriger automatiquement les arythmies cardiaques (c’est-à-dire les battements irréguliers du coeur), grâce à un choc électrique qui rétablit le rythme cardiaque normal. Les DCI modernes servent également de stimulateurs cardiaques et de défibrillateurs, même s’ils sont bien plus complexes.
  • Les services de répression (par exemple les officiers de police) peuvent porter des caméras ainsi que des microphones. Ceux-ci enregistrent le comportement de l’agent lorsqu'il est en service. Si une évaluation est nécessaire, les enregistrements de la caméra peuvent être consultés à la fois par l’agent et par l’employeur, ce qui ouvre la voie à la fois à un contrôle et à des observations sur sa conduite. Actuellement, ce n’est possible que hors ligne et a posteriori. Dans un avenir proche, il sera toutefois possible, en tout cas techniquement, de le faire en ligne en temps réel.

Par excellence, cette poignée d’exemples illustre l’utilisation et la large application des technologies de surveillance intégrées et portables. De nombreux autres exemples auraient évidemment pu être apportés. Le plus important est que la valeur ajoutée des technologies de surveillance soit clairement définie, y compris en ce qui concerne les conditions de travail et l’accès aux données, mais aussi de nombreux autres aspects, comme cela a été dit.

Les technologies (de surveillance) de persuasion

Même si tous les défis mentionnés sont relevés, les technologies de surveillance peuvent toujours être un échec, étant donné qu’aucun de ces aspects ne garantit un changement de comportement à long terme, pourtant nécessaire lorsqu’on vise un degré (plus) élevé de bien-être. Toutefois, grâce à une solution qui prend en compte les technologies de surveillance dans son équation (à savoir, les technologies de persuasion), il devient possible d’atteindre cet objectif. Les technologies de persuasion sont conçues dans le but de laisser la possibilité aux utilisateurs de changer volontairement de mentalité ou de comportement par la persuasion et l’influence sociale. En plus des technologies de surveillance, les technologies de persuasion ont recours à un algorithme d’influence ainsi qu’à des actionneurs afin d’offrir des observations actives à l’utilisateur. Ces informations en retour peuvent se traduire par un changement de lumière ambiante ou de musique, un message d’encouragement ou une comparaison anonyme avec une personne de référence (par exemple, des pairs).

Depuis les travaux précurseurs de Fogg[5], les technologies de persuasion se sont positionnées à la frontière entre les sciences sociales et l’ingénierie. Cependant, les enjeux des technologies de persuasion sont élevés. Les stratégies de persuasion sont difficiles à imaginer et à appliquer, mais en cas de succès, elles se révèlent très efficaces. La raison est simple: les technologies de persuasion n’ont pas recours à la contrainte. Le travailleur est donc motivé par lui-même à changer de mentalité et de comportement. Une forte motivation intrinsèque est particulièrement cruciale lorsque les changements doivent être maintenus sur le long terme. Par ailleurs, les processus automatisés peuvent être modifiés, éventuellement sans que le travailleur n’en soit complètement conscient, pour être améliorés et remplacer les anciens processus.

Les technologies de persuasion se sont déjà montrées efficaces dans la modification des comportements de santé. Pourquoi ne serait-ce pas le cas dans les milieux professionnels, en particulier si le bien-être subjectif des travailleurs en est la cible? Malgré toutes les réussites avancées, les technologies de surveillance souffrent tout de même de plusieurs faiblesses, notamment[6]:

  • l’absence de normes d’évaluation objectives;
  • l’intégration fragile des pratiques et des théories comportementales dans leur conception;
  • l’utilisation de plusieurs stratégies dans un seul modèle, sans aucun lien déterminé entre les stratégies, les réussites et les échecs;
  • le très faible nombre d’évaluations longitudinales de l’efficacité des technologies de persuasion et
  • l’absence de publics cibles lors de leur conception.

Prises dans leur ensemble, les technologies de persuasion ne constituent pas encore une branche mature de la science. Par conséquent, leur application pratique n’est pas attendue dans un avenir proche. Néanmoins, il s’agit d’un secteur prometteur de savoir interdisciplinaire, très pertinent pour les technologies de surveillance en faveur du bien-être sur le lieu de travail.

Quelle est notre position?

Les quelques défis abordés ne constituent en aucun cas une liste exhaustive; il s’agit uniquement des cinq plus importants. Ces défis doivent être surmontés pour que les technologies de surveillance en faveur du bien-être en milieu professionnel atteignent globalement leur maturité. Cependant, pour certaines professions, dans certains contextes, les technologies de surveillance de pointe actuelles peuvent déjà faire une différence considérable pour le bien-être des travailleurs, comme l’indiquent les exemples décrits.

Certains défis mentionnés finiront par disparaître avec l’évolution de la société et l’utilisation des TIC et, par conséquent, l’opinion des travailleurs sur des questions telles que la sécurité et la vie privée changeront également. En outre, il ne fait aucun doute que l’évolution des technologies de surveillance intégrées et portables s’accélérera et ces technologies deviendront plus accessibles, étant donné que leur coût diminue rapidement. Cela nous laisse donc face aux deux plus grands défis liés l’un à l’autre, à savoir l’interprétation et les technologies de persuasion. Le défi essentiel réside dans l’interprétation des données surveillées et, ensuite, dans le choix des mesures appropriées à adopter. Il s’agit d’un défi relatif aux sciences sociales (par exemple la psychologie et les sciences de la communication) plutôt que d’ordre technique. Le défi relève de notre degré de compréhension de nos travailleurs, de leur activité professionnelle, de leur environnement de travail et, tout simplement, de leur vie prise dans sa globalité.

Conclusion

Notre bien-être et sa surveillance représentent un domaine suscitant actuellement beaucoup d'intérêt et extrêmement compliqué de la science et de la pratique. Sans conteste, les technologies de surveillance feront partie de notre avenir. Les biocapteurs en particulier se propageront rapidement et prendront de l’importance. Toutefois, jusqu’à présent, il semble sage de remettre en question leurs fondements. Non seulement les technologies de surveillance ont le potentiel d’accroître notre bien-être, mais elles peuvent aussi nous aider à le comprendre. Pour cette raison, leurs conséquences sont encore plus vastes que ce qu’on pouvait imaginer. En outre, les technologies de surveillance ne se limitent pas à contribuer à notre bien-être; elles sont capables de beaucoup plus, y compris de renforcer notre sécurité.

Les technologies de surveillance ont débuté avec la SEP, axée sur l’amélioration de l’efficacité et de l’efficience de la production. La SEP a déjà démontré ses avantages et ses inconvénients, tout comme les TIC sur le lieu de travail en général. Dernièrement, la liste des désavantages des TIC a doublé, ce qui souligne l’aspect négatif des technologies. Les technologies de surveillance en faveur du bien-être au travail sont confrontées à leurs propres défis. D’autre part, on peut s’attendre à ce que certains disparaissent (par exemple la vie privée et la sécurité) ou soient surmontés (par exemple les questions relatives aux technologies intégrées et portables). D’autre part, les défis relatifs à l’interprétation et à l’inclusion des technologies de surveillance dans les technologies de persuasion devraient rester des défis majeurs pendant longtemps. Toutefois, comme illustré ci-dessus, pour certaines activités professionnelles et dans certains contextes spécifiques, les technologies de surveillance sont déjà en mesure d’accroître le bien-être des travailleurs.

En résumé, comme toutes les technologies qui interagissent avec les humains, les technologies de surveillance en faveur du bien-être doivent avant tout être centrées sur l’humain. Des applications spécifiques aux contextes professionnels, qui respectent la vie privée, la sécurité et la surveillance du stress du travailleur, existent et d’autres pourraient apparaître. Les technologies de surveillance en faveur du bien-être en général resteront un énorme défi pendant un certain temps. Les sciences sociales, plutôt que les sciences et l’ingénierie, doivent fournir des solutions significatives. Cela étant, les technologies de surveillance en faveur du bien-être ont déjà changé la donne sur les lieux de travail et le feront encore davantage à l’avenir.

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